Chef étoilé engagé pour la planète
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A la tête du restaurant d’un prestigieux palace parisien, Simone Zanoni offre une nouvelle définition de la gastronomie en la recentrant sur des valeurs environnementales et humanistes fortes. Pour le chef italien, la mutation « bio-vertueuse » est en marche dans le domaine de la haute cuisine.
Vous occupez la place de chef de l’un des restaurants du Four Seasons Hôtel George V, l’un des plus prestigieux palaces parisiens. Quelle serait selon-vous la définition de l’excellence ?
Pour moi l’excellence passe avant tout par l’expression d’un univers particulier et le respect de ses idéaux. L’objectif n’est plus d’atteindre la perfection, ni la première place ou le plus d’étoiles possible dans la gastronomie… Il s’agit avant tout d’être fidèle à son engagement. A titre personnel, la sauvegarde de la planète et la transmission des valeurs d’authenticité et de partage sont les domaines dans lesquels j’ai envie d’exceller.
Quelles actions en faveur de la préservation de l’environnement avez-vous pu mettre en place depuis votre arrivée au George en 2016 ?
Nos déchets organiques sont tous recyclés. Ils sont récupérés par une société spécialisée avec laquelle nous sommes partenaire, les Alchimistes, qui les transforme ensuite en compost. Je tenais également à travailler uniquement avec des fruits et des légumes frais. Nous louons donc des parcelles de terres cultivables dans les Yvelines, au domaine de Madame Élisabeth, qui sont entretenues sans produit chimique. Le George bénéficie ainsi chaque année de 3 à 4 tonnes de fruits et légumes biologiques, cueillis par nos cuisiniers !
Pourquoi est-ce important pour vous que votre équipe s’occupe elle-même de la cueillette ?
La connaissance du produit me semble fondamentale. En allant cueillir eux-mêmes, deux à trois fois par semaine, les légumes directement au potager, les cuisiniers les comprennent beaucoup mieux et évitent ainsi le gaspillage. Par exemple, plutôt que de s’obstiner à jeter les haricots verts trop courbés pour ne retenir que les plus droits, ils réalisent enfin que ce légume ne pousse pas de façon rectiligne ! La demande se trouve ainsi ajustée, car elle s’accorde au cycle de la nature. Par toutes ces actions, j’aimerais montrer qu’il est tout à fait possible de travailler de façon écoresponsable dans le domaine de la gastronomie. Je suis certain que tous les palaces feront bientôt de même, car le luxe est en pleine mutation. La transformation vers la responsabilisation environnementale est en marche, et nous avons tous un rôle à jouer dans cette évolution bio-vertueuse.
Quelles seraient les réflexes à mettre en place au quotidien pour faire évoluer notre façon de cuisiner ?
Toutes les actions, petites ou grandes, sont importantes pour le respect de l’environnement. Connaître les produits bien sûr, respecter leur saisonnalité. Aujourd’hui, les aliments sont accessibles toute l’année, on ne s’étonne même plus de trouver des tomates en décembre… La production est beaucoup trop importante et engendre un gaspillage parfaitement scandaleux. Une grande surface peut jeter jusqu’à 400 kilos d’aliments par jour… Si nous modifions nos comportements d’achats, en sélectionnant des aliments respectueux de l’environnement, nous agirons forcément sur la demande, et les industries agroalimentaires ainsi que la grande distribution seront obligé de s’adapter.
Comment est née votre passion pour la cuisine ?
J’ai grandi dans une ferme près du lac de Garde, en Italie. Même s’ils avaient des professions éloignées de la terre, mes parents tenaient à faire pousser leurs propres fruits et légumes et à élever leurs bêtes. Ils cuisinaient eux-mêmes ce qu’ils consommaient. Tout était fait maison. Mon père s’occupait de confectionner les pâtes fraîches pendant que ma mère préparait des gâteaux. Et lorsque l’on avait envie d’une pizza, on allait tous au grand four du village pour la cuire. Ma famille m’a inculqué le respect du produit et c’est cette vertu que je souhaite aujourd’hui transmettre à mon équipe, au public et aux générations futures.
De quelle manière vous employez-vous à transmettre les valeurs héritées de votre famille ?
Il était important pour moi d’éduquer mes enfants dans un environnement propice à la connaissance de la terre et de ses produits. Je me suis donc installé au Chesnay, en région parisienne, où je peux avoir un grand jardin. Nous y avons installé une ruche, six poules, deux tortues, un chien et même un cochon nain, Cookie, qui se régale de nos épluchures et des restes alimentaires que nous lui donnons à manger. Parfois même, je lui en rapporte du George ! Dans mon restaurant, j’ai instauré ce système de potager pour permettre aux cuisiniers de rester en contact permanent avec la nature. Le partage et l’authenticité étaient également au cœur de mes préoccupations. Je voulais que les clients soient accueillis dans une atmosphère chaleureuse et conviviale, où l’échange est possible voire propice entre le public et l’équipe.
Racontez-nous de quelle manière vous êtes passé de la ferme de votre enfance en Lombardie à l’un des plus célèbres palaces au monde ?
Grâce à la passion de la cuisine et à la volonté d’apprendre. Lorsque j’étais jeune, je passais tous mes week-end et mes vacances à travailler dans des restaurants. J’ai gravi les échelons progressivement. Puis j’ai appris que le très médiatique chef anglais Gordon Ramsay cherchait un cuisinier à Londres. J’ai tenté ma chance et il m’a accepté. Son exigence et sa grande efficacité m’ont beaucoup impressionné. En Angleterre, j’ai appris la rigueur et la persévérance… Mais la culture latine me manquait terriblement ! Aujourd’hui je suis très heureux de m’épanouir dans un restaurant dédié à la cuisine méditerranéenne.
Sur les réseaux sociaux, via votre site Internet, vos livres ou à la télévision, vous êtes devenu un chef médiatique. Quelle importance accordez-vous à la communication ?
Il me paraît important de mettre en lumière le parcours des chefs et de valoriser la gastronomie, car les professions manuelles ne sont pas encore assez mises en valeur. Les cuisiniers, les boulangers ou les restaurateurs de meubles anciens, tous les métiers de bouche et de l’artisanat sont indispensables à notre société et il faut absolument les mettre en avant. C’est pour cette raison que j’ai inscrit Xavier Pincemin, mon second, au concours de Top Chef en 2015. Il a d’ailleurs remporté la saison 7 du concours de M6.
Vous affichez 165 000 abonnés sur votre compte Instagram. Comment avez-vous rassemblé cette importante communauté ?
J’y consacre beaucoup de temps ! Je publie au minimum un post par jour, avec beaucoup de vidéos dans lesquelles je livre tous mes conseils culinaires. A mon sens, les recettes sont faites pour être partagées. Je tiens les miennes de mes grands-parents et de mes parents, et j’espère qu’elles continueront d’inspirer les gourmands dans les années à venir…
Avec humour, vous tordez également le cou à certains clichés sur la cuisine italienne, notamment sur l’utilisation de la cuiller pour manger des pâtes !
Il s’agit en effet d’une énorme erreur, surtout pour manger des spaghettis ! Jamais vous ne verrez un italien prendre une grande cuiller et enrouler ses pâtes à l’intérieur. En prenant des petites portions, la fourchette suffit amplement… Alors, jetez tous vos cuillers !
Une étoile (Michelin) est née !
En 1926, lorsque le fabricant de pneus Michelin lance, pour ses guides rouges, un système de récompenses des restaurants de qualité, il n’existe alors qu’une seule étoile. Les deux autres arriveront 5 ans plus tard, en 1931. Aujourd’hui encore, la plus haute distinction possible s’élève à 3 étoiles. En 2020, plus de 628 restaurants étoilés ont été honorés, et 29 d’entre eux en ont reçu 3. L’attribution d’une étoile se fait par les inspecteurs du guide Michelin qui effectuent, de façon anonyme, environ 250 repas par an. Le George, établissement dans lequel officie Simone Zanoni, affiche une étoile depuis 2017, soit quelques mois seulement après l’arrivée du chef.
Instagram personnel : @chefzanoni_simone
La transformation vers la responsabilisation environnementale est en marche et nous avons tous un rôle à jouer dedans.
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